Biomarqueurs pour le phénotypage de haute précision de la résistance de la vigne au mildiou

Biomarqueurs pour le phénotypage de haute précision de la résistance de la vigne au mildiou

Proposé comme fait marquant 2018 au département BAP

Résumé

La création de cépages résistants aux principales maladies de la vigne permet de réduire considérablement l’usage des pesticides en viticulture. Le succès de la création variétale repose néanmoins sur la capacité à caractériser précisément les sources de résistance issues des vignes sauvages. L’identification de biomarqueurs lipidiques spécifiques de Plasmopara viticola, l’agent du mildiou, a permis le développement d’une méthode de phénotypage de haute précision de la résistance au mildiou chez la vigne. Le suivi de ces biomarqueurs en spectrométrie de masse permet une analyse quantitative et qualitative dynamique du développement du mildiou dès les premiers stades de l’infection. Ces biomarqueurs permettent une caractérisation extrêmement précise des effets des différents gènes de résistance pour une optimisation de leur utilisation dans les programmes de sélection.

Contexte et enjeux

La viticulture est une activité majeure au sein de l'agriculture française, par son importance économique mais également par sa dimension culturelle. Cependant, la culture des cépages traditionnels nécessite de nombreux traitements phytosanitaires pour limiter les effets de différentes maladies d'origine fongique, ce qui fait de la vigne lune des cultures les plus consommatrices de produits phytosanitaires en France. La sélection des variétés de vignes résistantes aux principales maladies permet de réduire considérablement l’usage des pesticides et constitue une alternative durable sur le plan économique, agronomique et environnemental. Le programme ResDur a récemment abouti à l’inscription de nouvelles variétés de vigne possédant des résistances polygéniques au mildiou et à l’oïdium et des programmes de création pour des variétés à typicité régionale particulière sont actuellement en cours1. La création variétale s’appuie sur une stratégie de recherche continuelle de nouvelles sources de résistance issues des vignes sauvages. Ces recherches nécessitent des méthodes de phénotypage performantes, permettant, idéalement, de caractériser précisément les mécanismes de résistance mis en jeux en présence de chaque gène. En effet, l’efficacité et la durabilité du pyramidage des gènes de résistance repose sur la complémentarité des effets des différents gènes, en évitant autant que possible les redondances.

Résultats

Ces dernières années, la métabolomique par spectrométrie de masse s'est imposée comme une méthode de choix pour le phénotypage basé sur la recherche de biomarqueurs, en particulier dans le domaine de la santé2. Grâce à une approche de métabolomique non-ciblée en spectrométrie de masse, nous avons identifié et caractérisé des lipides spécifiques de P. viticola3. La quantification de ces biomarqueurs lipidiques permet un suivi dynamique de l'infection par le mildiou bien avant l'apparition des symptômes, aussi bien dans une variété de vigne sensible, partiellement résistante ou résistante. Cette méthode de quantification du développement de P. viticola à moyen débit (150 échantillons/jour) permet un phénotypage dynamique et extrêmement précis de la résistance au mildiou, basé sur le suivi du développement du mildiou. Grâce à l’analyse détaillée du profil lipidique de P. viticola, les données obtenues sont à la fois quantitatives et qualitatives tout au long du développement de l’infection (depuis 12h après infection jusqu’à la sporulation). Ceci permet d’analyser très précisément les mécanismes de résistance mis en jeux en présence de chaque gène et de caractérisation en détail chaque source de résistance, pour des combinaisons optimales dans les programmes de sélection.

 Perspectives

Cette méthode de phénotypage innovante est maintenant utilisée en routine par la plateforme de phénotypage pour la résistance au mildiou et à l’oïdium dans l’UMR SVQV, en complément des méthodes de phénotypage traditionnelles. Ce phénotypage de haute précision est actuellement utilisé pour la caractérisation détaillée de sources de résistances utilisées dans les programmes de sélection en cours. Cette approche peut très probablement être transférée à d’autres oomycètes pathogènes, compte tenu de la conservation des profils lipidiques entre oomycètes4.

La même stratégie de recherche de molécules spécifiques pouvant servir de biomarqueurs est actuellement appliquée à Erysiphe necator, l’agent de l’oïdium de la vigne. Cette approche a pour but le suivi dynamique de l'infection et le développement d'un test quantitatif d'évaluation de la résistance de la vigne à l'oïdium, test qui fait actuellement défaut.

Valorisation

Negrel L, Halter D, Wiedemann-Merdinoglu S, Rustenholz C, Merdinoglu D, Hugueney P, Baltenweck R (2018) Identification of Lipid Markers of Plasmopara viticola Infection in Grapevine Using a Non-targeted Metabolomic Approach. Front Plant Sci 9: 9599–11

Références bibliographiques

1. http://www.inra.fr/Entreprises-Monde-agricole/Resultats-innovation-transfert/Toutes-les-actualites/cepages-resistants

2. Crutchfield CA et al (2016). Advances in mass spectrometry-based clinical biomarker discovery. Clinical Proteomics, 13(1), http://doi.org/10.1186/s12014-015-9102-9

3. Negrel L et al. (2018) Identification of Lipid Markers of Plasmopara viticola Infection in Grapevine Using a Non-targeted Metabolomic Approach. Front Plant Sci 9: 9599–11

4. Spring, O., and Haas, K. (2002). The fatty acid composition of Plasmopara halstedii and its taxonomic significance. Eur. J. Plant Pathol. 108, 263–267.

Date de modification : 07 juin 2023 | Date de création : 13 décembre 2018 | Rédaction : Inra Grand Est-Colmar